Mot à Mot se déplace grâce à la représentation « De la justice des poissons » programmée dans le cadre du festival Les rencontres à l’Echelle, organisé par Les bans publics.
Si l’on se demande ce que parler veut dire, peut-être faut-il se demander d’où vient le « parler » ? Henri-Jules Julien entame un examen scrupuleux des conditions et des lieux du dialogue, interchange les sujets de celui-ci et déploie les décalages que crée le langage.
Dans De la justice des poissons, l’auteur qui habite Le Caire convie une comédienne syrienne, ici conférencière arabe polyglotte, spirituelle et espiègle. Plutôt que d’initier un dialogue avec le public, il lui suggère de l’inviter à dialoguer avec une idée. Ingénument, elle se demande si, au lieu de dire « Nous, habitants des villes européennes, n’avons-nous pas une part de responsabilité dans les désastres qui se produisent loin de chez nous, par le simple fait que nous sommes riches ? », elle remplaçait ce « nous » par un « ils » : comprendrions-nous tous la même chose ? Le glissement entre deux pronoms possessifs, de nous vers ils, change-t-il le point de vue ? « Nous » inclut, « ils » met à distance. Et dans cette distance, quelques malentendus ne naissent-ils pas ou quelques contradictions n’apparaissent-elles pas ? Il faut s’ébattre pour débattre… D’ailleurs, elle dialogue sur scène avec un contrebassiste têtu, s’il en est. Forcés tous deux de cohabiter, étrangers dans un même espace et nécessité faisant loi, parviendront-ils à inventer un nouveau langage… commun ?
Et si parler voulait dire quelque chose ?